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Trip épique en terres de kilt / Comment se rendre à St. Andrews avec 10% de chances de jouer le Old Course et manquer son avion de retour.

Trip épique en terres de kilt / Comment se rendre à St. Andrews avec 10% de chances de jouer le Old Course et manquer son avion de retour.

Un jour de printemps, je reçois un court message sur whatsapp par deux amis, Ben & Eddy : "St. Andrews pour un trip golf, ça te branche ? Départ dans un mois." Alors que je joue depuis quelques années, croyez-le ou non, je n'avais jamais voyagé spécifiquement pour jouer au golf à l'étranger.

Cette proposition avait ses arguments. Nous sommes en 2022, année du 150ème Open… à St Andrews. Un endroit dont tous les golfeurs, nouveaux ou chevronnés, ont entendu parler au moins une fois dans leur vie. Un lieu mythique, où les meilleurs joueurs de la planète, toutes générations confondues, ont tenté de laisser une empreinte. L’un des plus emblématiques, Bobby Jones, a même laissé entendre que : "La carrière d'un golfeur n'est pas complète tant qu'il n'a pas gagné à St. Andrews.” Le parcours étant dans la rotation traditionnelle de l’Open une fois tous les 5 ans, les opportunités de s’imposer sur cette langue de terre balayée par les vents sont rares dans une carrière professionnelle.

Dans mon imaginaire, j’associe St. Andrews à New York. Un lieu que j’ai vu tellement de fois dans mon écran de télé ou de téléphone que j’ai l’impression d’y avoir déjà été. Évidemment, y mettre les pieds pour la première fois n’a rien à voir. St. Andrews n’a pas les grattes-ciels new-yorkais (dieu merci), mais derrière ses coins de rue se cachent souvent des vues mythiques.

Pour un premier voyage 100% golf, la destination est iconique. En validant les billets d’avion, l’excitation monte d’un cran. L’aventure pouvait commencer. Il y a de la beauté dans la spontanéité du voyage dans son terme le plus primaire. Une seconde, il n’existe pas. La seconde d’après, il est réalité. “Rien derrière et tout devant, comme toujours sur la route”. *

 

 

Dans mon imaginaire naïf, St. Andrews est composé d’un parcours, le Old Course, posé au milieu d’une ville étudiante à taille moyenne. Et c’est tout. Ça serait beau non ? Notre bon vieux système capitaliste en a décidé autrement depuis des lustres 😉 Mais laissez-moi le droit de rêver, merci.

Passé le retour à la réalité, il s’avère que la machine bien huilée qui régit l’endroit propose une offre golfique solide. Appelée sobrement le St. Andrews Links, l'organisme propose un package permettant de jouer tous les parcours du complexe, à volonté, pour 100£ par jour. Sauf sur… le Old Course. Surprise motherfucker. Malgré tout, ce deal a un excellent rapport qualité/prix car tous les parcours entourant le tracé principal sont simplement fun à jouer. Mis à part le Castle Course, qui nous a causé de beaux malheurs (plus de détails sur ce parcours du diable un peu plus loin).

 

Mardi 3 Mai - Bienvenue à la Maison 

 

A l’aéroport de Bordeaux, direction Edimbourg, les valises pleines de fringues de pluie et d’espoirs de soleil, l’impression de débuter un pèlerinage était réelle. Nous n’échappons pas à une belle bière et un whisky à l’aéroport pour nous mettre dans l’ambiance écossaise. Deux heures plus tard, après avoir observé une quantité folle de golfs côtiers depuis notre hublot, les roues de notre avion touchent terre et un dernier soubresaut nous fait atterrir définitivement dans la capitale écossaise. Nous n’en verrons pas un pavé. Un van avec nos noms nous attend et fonce au nord-est à travers la campagne verdoyante du county de Fife.

A proximité de la ville, les flashs de drapeaux, de bunkers, de gorse et de moutons se multiplient. Puis la foule, massée sur la route, guettant notre arrivée, nous accueille dans une folle ambiance. Si seulement. Notre chauffeur, un loquace local, nous propose un tour de la ville avant de rejoindre notre logement. Bientôt s’annoncent, à travers les allées qui séparent les immeubles de style baroque, les fairways du Old Course. Passé le dernier bâtiment du bloc et les sourires béats (presque) effacés de nos visages, s’élance devant nous l’imposant monument du R&A, l’arrivée du 18, puis le départ du 1 et la “cabane” du starter. This is it. La proximité avec la mer me surprend, la marée montante poussant les vaguelettes à environ 300 m derrière le clubhouse. Nous avons la chance d’être accompagnés par une météo clémente qui annonce une fin de journée ensoleillée.

Une fois nos affaires déposées à notre logement, un airbnb à 10 min à pied du centre ville dans le pur style anglais, bow window à l’appui, nous claquons hâtivement la porte pour une marche de découverte.

Première information terrassante, le Old Course et le New Course sont fermés au public la majorité de la semaine pour cause de compétition des membres. Seul le vendredi semble jouable, notre dernier jour sur place. L’ambiance se refroidit légèrement à cette réalisation mais une bière au Jigger Inn, dangereusement (ou heureusement situé) au bord du fairway du trou n°17, redonne un peu de chaleur à notre trio. En sirotant une bonne Guinness, je pense à ces armées de joueurs affrontant chaque jour les 16 premiers trous, drivant au-dessus du fameux hôtel pour affronter le second coup du magique “Road Hole”. L’idée d’un “Beer-Drive” me vient alors à l’esprit, sorte d’extension du Jigger Inn, à quelques pas du rough, proposant un breuvage salvateur pour golfeurs au bout de leur combat contre le parcours. Vous l’aurez lu ici en premier si ce concept voit le jour.

Si vous ne le savez pas, quiconque pense pouvoir jouer le Old Course grâce à sa seule présence à St. Andrews peut aller à l’encontre de sacrées déconvenues. Mais 3 options sont possibles :

1 - La voie du roi - réserver entre 12 et 16 mois à l’avance en dépensant une somme d’argent incohérente. Chances de réussite estimées : 100% si le compte en banque est assez fourni.

2 - La voie du joueur - participer à la loterie 2 jours avant le jour de jeu souhaité puis prier pour être sélectionné. Chances de réussite estimées : 15%.

3 - La voie du baroudeur - se présenter à la cabine du starter au petit matin le jour J (en général vers 5h) pour tenter d’obtenir une place en solo, si il y a une disponibilité à n’importe quelle heure de la journée. Chances de réussite estimée : dépendamment de l’heure d’arrivée ⏰

L’option 1 n’a jamais été un sujet car hors budget pour nous. L’option 3 représente un dernier recours car elle ne nous permet pas de jouer ensemble. Reste l’option 2. Nous rentrons en marchant, en empruntant la fin du fairway du 17 et le fairway du 18, sans oublier de poser pour une photo au sommet du Swilcan Bridge, au cas où nous n’aurions pas l’occasion de repasser. Une initiative prise comme le signe d’un “à bientôt”, à la manière dont un joueur de foot embrasserait la Coupe du Monde en rentrant sur le terrain en finale, en espérant la soulever un peu plus tard. Le passage sur ce pont inspirera le design du couvre-putter que Twirl sortira à la suite de ce voyage.

 

 

Une fois revenu dans le centre ville, à 300 m du green du 18 du Old Course (je n’en reviens toujours pas à ce jour), un passage à l’institution qu’est le Dunvegan Hotel est obligatoire, pour un second arrêt rafraîchissement. Oui, exactement, une seconde bière. Le pub au rez-de-chaussée grouille de personnes du monde entier. Il est gorgé de souvenirs, de photos emblématiques, de moments de fête et de débriefings de parties interminables. Ici, j’en suis certain, bat l’âme de St. Andrews. Mais le voyage a été long, l’excitation des premiers moments est retombée. Il est temps de plier bagage afin d’être prêts à affronter le Jubilee Course, notre premier links le lendemain.


Mercredi 4 Mai - Premiers coups de coeur

 

Si vous êtes golfeur, ou simplement sportif un tant soit peu orienté compétition, il y a des chances que le matin d’un évènement spécial, vous soyez réveillé tôt. Trop d’adrénaline, d’anticipation, d’attentes. Jouer au golf et se lever au petit matin, aucun problème. Devoir se lever pour toute autre activité, c’est une autre histoire. J’ai raison ou non ? À 5h30, mes yeux sont grands ouverts, j’envisage déjà les premiers swings de la journée et je sens que mon partenaire de chambre est dans les mêmes dispositions.

Cette partie du nord de l’Ecosse est située à une latitude proche de Copenhague. À cette heure-là, le jour point, la ville s’éveille, les faibles phares des premières voitures fendent déjà les routes. En mai, les journées s’étirent. Nous aussi.

Nous partons, sacs de golf sur le dos, pour notre marche à travers les rues. Une chose me frappe rapidement : on a beau se situer dans une ville de moins de 20.000 personnes, comme il doit en exister d’autres dans les environs, les passants sont souvent équipés de sacs de golf. On se croise, on se sourit, on se donne un petit signe de la tête et on se dit parfois “profitez-bien les gars”, comme des signes soulignant le privilège et la chance de se situer à cet endroit .

Après un bon english breakfast, nous nous rendons vers le clubhouse principal du St Andrews Links, situé à quelques centaines de mètres du Old Course, en bordure de la mer. Des promeneurs et quelques apprentis surfeurs arpentent la plage, les premiers protégés par des écharpes, les seconds par des combinaisons en néoprène. La température de l’eau avoisine les 12°C. Nous n’irons pas la goûter.

 

 

Une fois nos chaussures de ville changées dans des vestiaires mêlant acajou et moquette épaisse, il est temps d’affronter le parcours. Se mettre en condition de jeu n’est pas chose simple. Dû au manque relatif de place sur cette langue de terre, il n’y a pas de practice. Notre talent parlera de lui-même. Après un court échauffement, je sors un bois 3, me présente sur le tee de départ du Jubilee et frappe un joli fade qui atteint les 210 mètres. Un beau top ne m’aurait pas surpris. Mais non, ça commence bien. Ben, puis Eddy fendent également le fairway.

Le Jubilee est le 3e parcours de St Andrews, après le Old Course et le New Course. J’ai déjà eu l’occasion de jouer des parcours type links, mais jamais vraiment sur les îles britanniques. Une question s’impose : a-t-on déjà joué un vrai links si ce n’est pas sur les îles britanniques ? Me définissant comme un joueur au niveau “honorable”, autour de 9 de handicap, ce qui me plaît avant tout dans ce jeu, c’est de manier la balle, de varier les trajectoires, d’imaginer des coups improbables avec des clubs improbables. Et de les tenter. C’est ma manière d’exprimer ma créativité sur un parcours. Je suis donc servi ici.

Ces parcours s’apparentent à des recettes griffonnées par une grand-mère dans un livre de cuisine. Tous les ingrédients sont là, devant nos yeux, mais les quantités et l’ordre ne sont pas bien définis. Quel en sera le résultat ? A nous de choisir une voie et de nous accommoder des conséquences.

De ma petite expérience, j’associe 2 choses au links golf : la liberté de créer et le devoir d’humilité. Le design est si bien pensé que ces parcours viennent constamment nous questionner, nous titiller, le diable et l’ange constamment posés sur notre épaule. Ils nous poussent, nous tempèrent, nous mettent au défi.

"The Good Miss", ce n’est pas une émission de téléréalité sur Netflix mais bien la réalité du golfeur : savoir manquer au bon endroit, spécialement sur ces links est primordial, dès la mise en jeu. Les obstacles cachés tels des Cerbères surgissent pour happer les balles s’éloignant du droit chemin. Sur ces fairways roulants et ondulés, les bunkers placés par Old Tom Morris douchent nos espoirs de score si on vient à leur rencontre. Ne reste plus qu’à sortir un fer 9 si on est chanceux, avaler sa fierté et se recentrer pour éviter un gros score. Diabolique.

Je ne vais pas vous faire un résumé trou par trou de ce parcours car ce serait vraiment peu intéressant à lire. Mais je retiendrai l’attaque du green du par 4 du 2, gardée par une butte épaisse à gauche et un arbre épouvantail à droite qui donne un aspect particulier au trou. Depuis le coup de fer à taper, le green semble pris en étau. Daunting.

En évoluant sur le Jubilee, on peut aussi apercevoir quelques trous des autres parcours, si bien qu’on a toujours le coup allongé pour tenter de saisir une image qui serait familière. Nous tentons ce jour-là d’obtenir le Graal ; un départ sur le Old Course. En mettant nos noms le matin-même dans le Ballot pour le surlendemain (c’est le principe), nous espérons décrocher la timbale et pouvoir jouer le parcours mythique le vendredi, seul jour d’ouverture durant notre séjour.

 

 

En arrivant sur le départ du 8, l’océan est à quelques dizaines de mètres à gauche du sentier côtier, derrière la barrière de hautes herbes. Le drive doit flirter avec le bord de l’océan pour trouver une ligne intéressante. Jusqu’ici, je n’ai pas fait allusion à un de nos partenaires de jeu, qui nous causera de beaux tracas lors du séjour. Je parle simplement du vent. Peu présent sur la première partie du parcours, il s’invitera sur le reste de la journée. En quelques instants, les fairways rétrécissent et les balles aux légers effets commencent à prendre des proportions terrifiantes.

Après quelques trous du retour qui ne m’ont pas marqué outre mesure, le départ du 15, encaissé entre 2 collines, sorte de volcan à l’envers, représente un challenge vraiment excitant lorsqu’on trouve la bonne ligne, que la balle survole et fait coucou à la principale difficulté du trou. Le 18 nous fait revenir vers la ville et nous rappelle d’un coup où nous nous trouvons. The Home of Golf.

Le retour au club house du St. Andrews Links est synonyme de reprise de forces auprès d’une bonne pinte de cidre et d’un burger frites. La journée étant encore jeune, nous tentons d’obtenir un tee time sur un autre parcours, l’Eden. Il faut comprendre que la ville est constamment envahie de golfeurs surexcités voulant engloutir le maximum de trous en une journée. Notre approche plus détendue nous a amené à prendre davantage notre temps. 3h se profilent devant nous avant notre prochain départ. L’occasion d’aller peaufiner notre petit jeu sur la zone d'entraînement du Eden Course, entourée des tribunes en construction pour The Open. Bien présentes et floquées du “150”, elles confèrent un aspect spécial au lieu. On entend presque vrombir le public écossais.

 

 

J’en profite pour shooter une partie des produits Twirl emmenés dans ma valise, car le soleil pointe son nez et les couleurs du gorse, jaune vif, s’ajoutent au vert pétant pour former un arrière plan parfait. J’aime particulièrement les “dry stones walls”, sorte de murs de pierres anciennes qui délimitent certains endroits du domaine. S’y perdre au petit matin ou le soir assure de rapporter des clichés fantastiques.

J’adorerais avoir plus de temps pendant ce voyage pour photographier les parcours, mes potes, les paysages et les produits de golf que je conçois. Mais essayer de me concentrer sur mon jeu et réaliser des clichés corrects alors que les parties de 4 s'enchaînent toutes les 8 minutes est déjà une tâche ardue 😅 Je choisis cette fois-ci le rôle de joueur.

Pendant notre longue attente avant de découvrir l’Eden (le parcours hein!), un email annonce la sortie des résultats du ballot pour le Old Course. En scrollant sur un de nos téléphones, commence à défiler les noms des joueurs du jour. Premier départ à 6h30. Puis la terre s’arrête de tourner quand nos 3 noms s’affichent pour un royal départ à 11h40 !!! S’ensuivent 10 minutes d’une euphorie de gamins ayant réussi à forcer l’accès à Disneyland avec bonbons illimités. La chance nous sourit.

Légers comme des plumes suite à cette bonne nouvelle, nous prenons le départ de l’Eden sous un vent costaud, qui s’amplifie au fil des trous. Les erreurs se payent vite très cher. Rattrapé par mes émotions, je décroche progressivement et essaie de limiter la casse mais le parcours me tient par le col et ne me lâche pas. Beaucoup de coups moyens, même sur des coups relativement faciles, me font sortir de la partie.

Le vent, insensible, a fait reculer les nuages ainsi que mon chariot, qui dégringole dans un pot bunker. Les signes ne trompent pas. Je relativise et essaie de profiter du paysage autant que je peux. Mes partenaires, Ben et Eddy, tiennent bon et quelques birdies font leur apparition sur leurs cartes, annonçant la sortie des flasques. Ces petites lampées de liquide nous réchauffent l’âme et le gosier.

 

 

Nous disons au-revoir au parcours quelques trous avant la fin car les bourrasques ne faiblissent pas et la luminosité commence à s’estomper sur la baie. Autant se préserver pour les jours suivants et revenir vers le centre ville. Le Jigger Inn se dresse de nouveau sur notre route, décidément bien placé. Un bunker pour golfeurs en roue libre. La conversation s’oriente cette fois-ci sur la chance qu’il nous est donnée de fouler ce trou n°17 en fin de semaine. L’un d’entre nous en gardera un souvenir mémorable.

Au soir de cette première expérience du golf écossais, le sentiment prédominant est toujours l’émerveillement. Ces parcours sont vraiment drôles à jouer, on s’y amuse. La notion de jeu est évidente, elle émane de chaque bosse, de chaque mouvement de terrain. Tout a-t-il été réfléchi pour que le golfeur s’arrache les cheveux avec le sourire ? On a envie de croire que oui.

Le lendemain s’annonce le Castle Course, le dernier né du domaine. Après la douche, nous avons la bonne idée de nous faire livrer de la cuisine indienne. Nous l’engloutissons avant de baisser le rideau sur cette journée et de tomber sans bataille dans nos lits respectifs. Good night !

 

Jeudi 5 mai - Le vent l’emportera

 

Si vous êtes dans les hautes herbes, n’essayez pas de trouver votre balle, sortez-en une nouvelle du sac et rejouez depuis un point proche”. Quand le starter prononce cette phrase en guise d’introduction, c’est pas bon signe.

En nous levant ce jeudi, le moral est au beau fixe. Nous sommes à St. Andrews pour jouer au golf, il y a du soleil, que demander de plus. Au programme aujourd’hui, le Castle Course situé à 15 min en voiture de la ville. Nous n’avons pas de voiture mais les nombreux taxis-vans sont faciles à trouver. Avec un départ vers midi, un petit-déjeuner dans une bakery locale semble être une option parfaite.

Le temps de prendre des forces et les sacs sont enfournés une heure plus tard dans le coffre du taxi. Direction le sud. Premier indice une fois sur la route, pas évident à remarquer depuis l'intérieur des murs protégés : il y a du vent. Du gros vent. Je ne parle pas de tempête mais du vent qui dit “là, tu vas te marrer mon gars”.

Les 7 parcours locaux accueillent environ 230.000 parties de golf chaque année. Avec cette fréquentation mondiale, je dois dire que l’organisation et l’accueil sont aux petits oignons. Avant chaque parcours, on nous remet une pochette avec le carnet de parcours, des tees, un relève pitch ou un marque balle. Ce sont des détails qui font se sentir spécial.

Le domaine du Castle Course est peut-être celui le plus moderne, avec un club-house vitré donnant sur le double green du 9 et du 18. Ouvert au public en 2008, il est le plus récent et de loin. Les vues surplombant la côte et le château de St. Andrews au loin sont à couper le souffle.

On remarque vite que le parcours est à flanc de côteau et que les dénivelés vont être intéressants à négocier. Direction le practice cette fois, lui aussi moderne, avec ses pyramides de balles neuves bien rangées. Assez classe. Je pensais que les pyramides étaient créées à la main par des techniciens égyptiens spécialement formées à une technique secrète ancestrale. Pas du tout. Passé cette déception, nous tapons quelques balles dans le vent en essayant d’évaluer le type de trajectoire à adopter sur ce parcours.

 

 

Sur le tee de départ, une voix sympathique mais ferme s’exprime de manière répétitive aux parties de 4 qui s’enchaînent : “jouez rapidement, ne cherchez pas vos balles. 4h maximum, bon courage, bonne partie”.

Avec un bon 40 km/h de vent, autant dire d’emblée que cette partie a été compliquée pour nous tous. N’ayant pas l’habitude de jouer avec cette intensité de vent, sans connaître un parcours et les zones à atteindre ou éviter, le score montera très (très) vite. Le stock de balles diminuera à vue d'œil et nos espoirs de rendre une carte correcte seront vite tués dans l'œuf. Le parcours laisse très peu de chances aux égarements, le rough avalant les écarts sans état d’âme.

Pour atténuer la douleur de notre saignant score, les vues mer, présentes sur les 4 derniers trous de l’aller, sont spectaculaires. Autre source de satisfaction, la présence au départ du 9 d’une cabine téléphonique spéciale pour commander à manger et à boire avant d’attaquer le retour. Nos besoins primaires sont alors satisfaits. A installer dans tous les golfs messieurs les directeurs !

A l’arrivée du trou 10, la distance affichée pour ce par 3 est de 175 m en montée, plein vent contre. Hum. Here we go again. Autant vous dire que le niveau de jeu n’a pas connu de grand rebondissement dans notre groupe sur le retour. La voie choisie a été de relativiser, d’essayer de passer un moment agréable et de faire le mieux possible dans les conditions données face à un parcours qui secoue.

Malgré nos efforts pour garder la balle en jeu, un tabassage en règle nous est infligé. La beauté des derniers trous, notamment le 17, par 3 de 170 m, n’enlève rien à sa difficulté sous 50km/h de vent latéral. Pour atteindre un green peu profond, il est nécessaire de réaliser un long coup de fer pour survoler de l’eau et des rochers.

A cette moment de la journée, j’avais envie de me mettre en boule, de rouler jusqu’au green du 18, qu’on m’allonge dans un canapé confortable avec une boisson chaude et qu’on me caresse les cheveux en me disant “ça va aller”. Evidemment, mon coup de fer 5 n’a jamais vu un bout de green et la carte s’est alourdie d’un bon triple bogey. Anecdotique dans cette journée fantomatique.

 

 

En voyant la mine fatiguée des autres joueurs en arrivant au club house, leur peau rougie par le vent, leurs cheveux aplatis, leurs hochements de tête de gauche à droite, nous nous sentâmes moins seuls. Nous décidons de ne pas nous laisser abattre en visitant la brasserie Brewdog, parfait spot pour oublier cette cuisante défaite avant d’aller nous jeter dans les bras de Morphée. Avant de passer du rêve à la réalité le lendemain pour notre rencontre avec The Old Course.


Vendredi 6 mai - L’heure de briller

 

Encore un matin ou l’horloge interne s’éveille en avance, sur les coups de 6h. Cette fois-ci est la plus compréhensible de toutes. Nous allons humblement fouler quelques hectares de terrain chargés d’histoire.

Pour remettre les choses dans leur contexte, la première partie répertoriée à St. Andrews remonte à 1574. Bien avant que Old Tom Morris ne se penche sur l’architecture pour faire face à l'augmentation du nombre de joueurs. Il fait alors en sorte d’améliorer les greens et de créer des aires de départ séparées pour chaque trou ; toutes ces mesures permettent de répartir le jeu sur de plus grandes surfaces et d'améliorer les conditions du gazon. Il créé un nouveau premier green sur l'Old Course et conçoit la version initiale du New Course en 1895 et du Jubilee Course en 1897. Il introduit aussi l'idée moderne de placer les obstacles de manière à ce que la balle de golf puisse les contourner ; ce fut le début de la conception stratégique, courant dominant depuis.

Avant lui, les obstacles étaient considérés comme des obstacles qu'il fallait dépasser ou qui étaient là pour punir une balle malencontreuse**.

La petite superficie de la ville permet d’arriver sur le parcours par la rue. La marche de 15 min depuis l’appartement est silencieuse, studieuse, remplie d’excitation intérieure. Seuls quelques regards facétieux sont échangés en chemin. Dépasser le dernier building bordant le parcours permitt d’entrer pleinement dans la journée. Un regard sur la gauche épouse directement le green du 18 puis le départ du 1, collés l’un à l’autre.

Certains rentrent leurs derniers putts alors que d’autres s’apprêtent à frapper leur coup de départ. Tous ceux présents ici ont le sourire. Sauf quelques personnes blasés pour qui l’humanité ne peut rien. Avant d’aller nous échauffer, nous passons par la petite cabine du starter afin de régler notre green-fee, s’élevant à 325£ car nous venons de passer en haute saison. En rétrospective, le pourcentage de chances d’obtenir un tee time à la loterie sont estimées autour de 15%. On n’est pas tous les jours à St. Andrews. Pour faire marcher vos facultés en calcul mental, environ 50.000 parties sont jouées chaque année sur le Old Course.

Ka-ching !

 

 

Comme au Jubilee plus tôt dans le voyage, pas de practice à proprement parler pour capter les sensations du jour, seulement quelques tapis uniques entourés d’un filet. Bonne chance pour aborder le start du 1, clairement le plus stressant. Le fairway est pourtant extra large mais il reste entouré des tribunes installées pour The Open donnant sur un hors limite à droite, alors qu’à gauche défilent les parties du 18. La seule sensation se rapprochant du parcours sera le putting green, collé au départ. Une vue parfaite pour observer d’autres personnes stressées 😅

11.30 - à 10 minutes de notre horaire, nos noms sont appelés par le starter, qui nous adjoint un lucky winner s’étant présenté au petit matin. Ce 4e partenaire, un étudiant américain au physique de bûcheron, est en voyage de golf avec ses amis dans les environs. Il a pu aller visiter d’autres parcours dont Kingsbarns, Carnoustie ou bien le parcours du Scottish Open, The Renaissance.

Nous n’aurons pas beaucoup l’occasion de discuter avec lui pendant la partie, un peu plus intéressés par les conseils de son caddie qui nous donnera des tips sur les lignes de jeu pendant la partie. Si votre budget vous le permet (pour environ 100£ + tips), les conseils d’un cadet local sont bien utiles pour éviter certains pièges du parcours.

En voyant la trajectoire de ma balle appliquer un joli fade, fendant le fairway du 1er trou, je respire un grand coup. Entre les parties qui finissent, les joueurs qui attendent et les passants, il y a une belle quantité de pairs d’yeux observateurs. Personne ne se troue au sein de notre quatuor et c’est déjà un exploit. Lancés, toutes dents dehors, les téléphones sont de sortie pour rendre ce moment immortel dans notre mémoire.

Le Swilcan Burn, une rivière serpentant sur le parcours, est la principale difficulté de ce trou, faisant office de bord de green très humide. Il accueille à bras ouverts les balles courtes. Mon coup de wedge me donne une honnête première occasion de birdie, que je ne convertirai pas. J’adore déjà ce parcours.

Le starter nous incite à tenir un bon rythme (4h de jeu) car les parties s’enchaînent. Pas le temps de traîner. Sur ce tracé, on retrouve presque toujours sa balle, grâce à un rough clairvoyant et des buissons en faible nombre. Le rythme est soutenu et les bons joueurs sont légions. Par conséquent, le temps passe trop vite et les trous défilent.

La réelle beauté de ce parcours réside encore une fois aux possibilités diverses données aux joueurs sur tous les coups, notamment sur les approches lorsqu’on est court du green. Moi qui aime les approches longues, roulées, car peu à l’aise avec les coups de sandwedge portés, je m’éclate. Je tente. Lorsque je suis félicité par un caddie local après un coup de 8 roulé de 50 m qui s’arrête à 40 cm du trou, je savoure. Il faut par endroits survoler des bunkers qui font peur tellement ils sont profonds ; y tomber demande de sacrées capacités à faire monter la balle, and quick !

La grande particularité du parcours, ce sont ses doubles greens. Sur le Old Course, seuls 4 trous ont leur propre green. Pour ne pas se tromper (et ça arrive), les drapeaux de l’aller sont blancs et ceux du retour, rouges. Visuellement, c’est parfois perturbant. Et une grosse erreur lors d’une approche peut parfois laisser un putt de 30/40/50 m 😅

 

 

Un joueur se détache dans notre partie. Eddy semble être très en forme. Il commet peu d’erreurs, son jeu est en place, il touche fairways et greens régulièrement. Il commet un premier birdie au 5. Flasque. Puis le petit par 4 du n°9 (247m) nous permet d’inscrire un birdie mutuel sur la carte. Re-flasque.

En ce vendredi de mai, les conditions sont calmes. Le soleil apparaît par intermittence mais il y a surtout peu de vent. Le parcours dans ces conditions baisse sa garde, privé d’un de ses plus robustes défenseurs. Mon putting est aux abonnés absents et malgré des opportunités régulières de birdies dues à un grand jeu correct, je finis l’aller en +4.

Notre quintet progresse rapidement sur les premiers trous du retour. Le placement des drapeaux, sur ces greens souvent immenses, très ondulés, peuvent laisser des putts à pentes multiples. Le lag putting est alors testé. Le souvenir d’un putt de 40 mètres sur le par 4 du 13 me hante encore. L’aspect des greens, piqué de vert sombre, de gris et de noir, mêlé à des zones plus claires et plus sèches peut surprendre au premier abord. De quoi douter de leur qualité ou de leur roule. Une fois les pieds posés sur les premiers greens, ces doutes s’envolent.

L’envie d’appuyer sur un bouton ralentissant le temps est forte car la partie défile trop vite. En approchant déjà du fameux trou n°17, l’idée du coup de départ mythique, à propulser au-dessus de l’hôtel, fait frissonner. Soit on atteint le fairway, soit on atteint un client de l'hôtel sur son balcon.

Heureusement pour nous, pas de blessés cette fois. Ma ligne un peu agressive me rapproche dangereusement du hors limite proche du Jigger Inn et me laisse un coup de fer 5 pour le green depuis le petit rough. Celui-ci prend une ligne parfaite mais roule un peu trop, pour finir en contrebas sur le chemin à hauteur du trou.

C’est le moment que choisit Edouard, placé au milieu du fairway, pour décocher une fléchette d’anthologie et poser sa balle a 3 m du trou. Cette approche de 185 m est d’autant plus difficile qu’elle doit survoler le bunker le plus emblématique du tracé et s’arrêter très rapidement pour se rapprocher de la position de drapeau la plus compliquée, située dans le minuscule fond de green. Le putt pour birdie qui suivra ne déviera jamais de sa trajectoire et entrera par le milieu du trou. Masterclass. Flasque. Le compliment du caddie local, disant qu’il voyait très rarement des birdies avec le mât placé à cet endroit, rajoutera de la saveur à ce petit exploit.

 

 

Même en voyant ma balle sortir au-dessus des immeubles sur la droite au 18, pourtant (très) large sur sa partie gauche, le sentiment prédominant fut la reconnaissance, la chance d’avoir pu jouer sur ce tracé. Le plaisir aussi d’avoir vu un de mes amis planer sur ce parcours en rendant une carte de 76.

L’euphorie ne nous quitta plus ce soir-là. Il fallait fêter la fin de notre séjour et cette belle carte. Après quelques cocktails célébratoires sur le rooftop du Rusacks Hotel, il fallait dire au revoir à cette vue folle du parcours avant de reprendre l’avion pour rentrer le lendemain matin.

Ce récit pourrait s’arrêter là mais il ne serait pas complet. A ce jour, je ne m’explique pas complètement comment nous avons fait pour manquer notre avion.

Enfin, si. Une tournée des bars en règle suivie d’une fin de soirée au Vic nous a plongés dans les profondeurs de la nuit écossaise si bien que le taxi prévu pour nous récupérer à 7h n’a jamais réussi à nous réveiller. Malgré de nombreux appels et sonneries à la porte, aucun de nous trois n’a réussi à ouvrir l’oeil à temps.


Samedi 7 mai - Walk of shame

 

Notre réveil en sursaut à 9h a fait prendre un tournant épique à notre retour. Il a fallu booker en urgence une autre navette pour Edimbourg et un nouveau billet d’avion, avec une escale obligatoire par Amsterdam. Une somme rondelette s’est envolée de nos comptes en banque pour nous permettre de retrouver (enfin) notre port d’attache.

Cet écart de conduite a fini de garnir nos mémoires collectives de souvenirs indélébiles et nous a donné le goût pour d’autres aventures en terres britanniques.

Merci d’avoir parcouru ce premier article du Fooorecast et à bientôt !

Cheers.

 

 

* Source : "Sur la route", Jack Kerouac, 1957

** Source : Wikipedia

 

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